Le tournedos. Que des humiliations linguistiques


le tournedos. Que des humiliations linguistiques


Jamais un bout de viande soit, une tranche épaisse de rôti de boeuf taillée dans le filet et bardée d'une fine tranche de lard, n'aura suscité autant d'humiliations linguistiques.
A savoir, avant de désigner une pièce de viande, le « tourne-dos », tel qu'il s'écrivait à l'origine, était une personne lâche, un couard, un poltron.
Et comme si ces origines de pleutre ne suffisaient pas, le mot a connu un destin encore plus douteux… chez les poissonniers. Au XVIIIe siècle, « exposer à tournedos » signifiait présenter le poisson à l'envers. Cela permettait de différencier la marchandise qui s'était, disons… lassée d'attendre sur l'étal !
Entre lâcheté et fraicheur douteuse, nous voilà exilés aux antipodes d'une pièce de viande pleine de promesses. Mais alors pourquoi cette pièce de viande porte-t-elle ce nom de « tournedos » ?
En 1962, l’Académie Gastronomique notait ceci : On appelait « tournedos », les bouts des filets de boeuf restés quelques jours à la resserre (la réserve, ndlr). Ce terme ayant été mis par inadvertance sur une carte de restaurant, il aurait été adopté par les clients qui, bien entendu, en ignoraient le sens... Et ici encore une humiliation linguistique.
Le Larousse gastronomique lui préfère une autre version : L'origine du tournedos est liée à l'apprêt (foie gras et truffes) commandé par Rossini si surprenant aux yeux du maître d'hôtel de l'époque que celui-ci fit passer le plat « dans le dos » des convives !!! D'où l'appellation de tournedos. Mais même dans ces circonstances alléchantes, le nom de tournedos conserve le fumet de lâcheté évoqué ci-dessus.

Bref, avec ce nom empreint de lâcheté, de moisi, et qu'on lui aurait donné par inadvertance, soyons reconnaissants au tendre tournedos.


Date de création : 03/03/2024 18:56
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